Anne SLACIK
Jardin verticaL

Editions de l’Ariane (2008) – 30 exemplaires + 2 H.C. numérotés et signés au colophon par l’auteur et par l’artiste.

G5

Toute fleur et une cicatrice
Lésion d’un vide par accueil
qui devient un sexe visible :
une bouche de pollen à bout de langue
plurilabiale comme sont les gloutonneries

Tita Reut

 

Anne Slacik | Jardin verticaL

Les poèmes de Tita Reut accompagnent 10 peintures originales signées par l’artiste sur 7 cahiers et la couverture. Tous les livres sont signés au colophon par l’auteur et par l’artiste.
François Huin a typographié les textes à la main, sur les presses de la SAIG, à L’Haÿ-les-Roses, en Garamond corps 13 & 14, sur papier Vélin d’Arches 300g.
La boîte en plexiglas, ouvragée par Marc Butti, à Nice, a été sérigraphiée par Eric Seydoux, à Paris.

 

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L’œuvre d’Anne Slacik métaphorise le passage de l’aquatique au végétal, dans un mouvement d’objectif et de profondeurs de champ qui font perdre pied aux certitudes. Une œuvre reconnaissable mais évolutive, dont la mobilité accoutume l’exercice du regard : d’une vision d’ensemble à la considération du détail et du particulier.
Ainsi, les premières grandes toiles colorées, au-delà de la notion simplificatrice d’ « abstrait », nous plongent dans un engloutissement rituel de couleurs. Pourquoi rituel ? Car la pratique très personnelle d’Anne Slacik répond aujourd’hui en elle à une maîtrise très intériorisée qui dégage un mécanisme de rapidité tel qu’il permet de déposer sur la toile des pigments plus ou moins denses, plus ou moins dilués, plus ou moins stagnants, et, par là même, d’ « ouvrir » des seuils.
Dans un deuxième temps, les arbres se sont mis à pousser les pieds dans l’eau et nous ont entraînés vers des marécages sans berges, sans limites, et dont l’horizon n’est jamais borné. La sensation de vie fragile y est amplifiée par le mystère d’un lieu à peine retenu, d’un instantané par définition fuyant et fugitif. Nous ne sommes dans la transition qu’on dit « entre chien et loup », dans un basculement qui greffe le végétal au liquide dont il semble émergé contre toute possibilité.
Dans sa troisième manière de grands « Wall Pieces », comme disait Arman en parlant de ses grandes mécaniques murales, Anne rapproche distinctement l’objectif dont je parlais plus haut. Les fonds s’étoffent, parfois brûlent ; les branches agrandies font vibrer les plans superposés. On n’évoque ni l’origine ni la destination. C’est un présent furtif qui, cette fois, affirme le constant oxymore du moindre-solide, de l’humble-tenace, d’une présence gratuite, fortuite, mais incontournable. C’est un présent déterminé mais sans destin. La grande beauté des toiles vient de ce qu’elles sont bien au-delà de la description et du descriptible. Elles sont une métonymie du vivant. Et ces géométries n’ont pas d’autre centre que l’écartement, l’écartèlement par où l’être occupe l’espace par quatre points cardinaux plus le lieu où il se trouve qui fait varier le Nord selon son déplacement. Ainsi, l’homme est-il ou devient-il jardin… Le jardin qui est donné à voir.

Tita Reut